csefigLe Figaro – 30/09/2016

Stopper la désindustrialisation et encourager les travailleurs indépendants devraient être deux priorités du prochain président.

Dans le cadre de la présidentielle 2017, le concours Lépine des baisses d’impôts est lancé. Le gouvernement actuel a enclenché plusieurs baisses d’impôts sur le revenu au bénéfice des classes populaires afin d’acheter des voix, à supposer que le peuple soit dupe. À droite, plusieurs candidats proposent des baisses d’impôts sur le revenu, voire une baisse de la CSG, afin de ne pas désespérer les électeurs.

Alors que la dette publique est passée de 85 % du PIB à fin 2011 à 96 % du PIB à fin 2015, elle atteindra vraisemblablement 98 % du PIB à fin 2017. La croissance est en train de s’affaiblir car nos blocages internes n’ont pas permis de transformer la chance historique de la triple baisse du prix du pétrole, de l’euro et des taux d’intérêt en 2014-2016 en croissance durable.

De ce point de vue, le quinquennat de François Hollande est un double désastre : le choc fiscal de 2012-2013 (hausse de 60 milliards d’euros des prélèvements obligatoires en deux ans) n’a que marginalement réduit le déficit (baisse d’un point du déficit seulement de 2011 à 2014 pour un choc fiscal de trois points de PIB) tandis que sa politique économique a détourné les investisseurs de l’Hexagone.

La croissance annuelle moyenne a été de 0,6 % en 2013-2014 et de 1,3 % en 2015-2016 avant de redescendre vraisemblablement à 1 % en 2017. Si le déficit était un facteur de croissance, cette dernière aurait dépassé 3 % depuis quinze ans ! Or, nous constatons un taux de croissance proche de 1 % sur la période 2001-2015 et un retour à ce taux en 2017.

Les facteurs de blocage de la croissance ont été renforcés par Hollande : hausse massive de la fiscalité du capital, multiplication de mesures de blocage du marché du travail (compte de pénibilité, introduction de syndicats politisés dans un tissu fragile de PME, etc.). La loi El Khomri ne peut produire d’effets car le président de République avait exclu du périmètre de la loi les trois facteurs clés du déblocage du marché du travail : le contrat de travail, les seuils sociaux et une limite effective des indemnités de licenciement. Sans parler de la dégressivité des allocations chômage.

La croissance est le fruit de trois facteurs clés de progrès : un investissement productif favorisant la hausse de la productivité, l’élévation des compétences des travailleurs et le renforcement de l’innovation. La seule mesure décisive en faveur de la croissance depuis dix ans a été le renforcement spectaculaire du crédit d’impôt recherche en 2008, mesure initialement décriée par la gauche avant d’être maintenue.

Il faut s’interroger sur la situation actuelle de l’économie française avant de considérer qu’il serait rassurant pour les électeurs de baisser les impôts au moment où l’on fera des réformes structurelles absolument nécessaires pour réduire la dépense publique de 5 points de PIB en 5 ans : taux unique à 25-28 % sur la fiscalité du capital et sur l’impôt sur les sociétés, division par deux des taux de l’ISF, réforme du contrat de travail et des seuils sociaux, réforme des retraites, réduction significative du nombre de fonctionnaires dans les missions non régaliennes.

Notre système productif est à genoux. Le déficit de la balance commerciale des échanges industriels augmente et tout gain de pouvoir d’achat se transforme en importations. Pour être plus précis, les Français consomment en moyenne environ 70 % de produits français et 30 % de produits importés. Mais quand on leur donne 100 euros de revenu supplémentaire, la proportion s’inverse : toute baisse des impôts sur les ménages, à ce stade, se traduit en hausse massive des importations ! La mesure la pire serait une baisse de CSG qui est le seul impôt intelligent que nous ayons avec la TVA : une large base et un faible taux.

Certes, il faut réformer la fiscalité du capital pour réattirer les investissements sur notre territoire et enclencher un train de réformes structurelles fortes et efficaces. Pour autant, réduire la CSG représenterait une erreur stratégique et baisser l’impôt sur le revenu de façon générale serait contreproductif. En revanche, remonter le quotient familial pour redonner confiance aux familles qui sont le fondement de la société, augmenter les incitations à l’investissement en actions des entreprises et accélérer la modernisation de nos usines par un amortissement fortement accéléré, sont des mesures nécessaires et cohérentes avec notre situation économique réelle.

En outre, dans le cadre de l’ubérisation de l’économie, il faut transformer le RSI (régime social des indépendants) en protection sociale offensive au service de tous les non-salariés en réduisant les cotisations d’un quart et en mettant en place l’autoliquidation des cotisations sous contrôle a posteriori des gestionnaires du régime.

On ne rassurera pas les Français en leur distribuant des bonbons. Il faut reconstruire en s’appuyant sur ce qui reste solide dans notre pays : les chercheurs et entrepreneurs innovants, les entreprises productives, les familles qui passent beaucoup de temps à éduquer leurs enfants, les travailleurs indépendants qui se battent avec le couteau de l’ubérisation sur la gorge, et tous ceux qui aiment passionnément notre pays. * Professeur titulaire de la chaire d’économie au Conservatoire national des arts et métiers. Auteur de « Relever la France : état d’urgence » (Odile Jacob, septembre 2016).

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