cselefigaroLe Figaro – 23/09/2014

« Se résigner à un déficit au-dessus de 4 % place la France dans une position très vulnérable »

Le président de la République, dans sa conférence de presse de la semaine dernière, a déclaré en substance, avec beaucoup d’assurance sur ce point, alors qu’il semblait douter de tout par ailleurs : « Non, nous ne ferons pas plus d’économies que les 50 milliards annoncés, car, au-delà, cela nuirait à la croissance. » Eh bien, Monsieur le Président, vous avez tort !

Mais de quelle dépense parle-t-on ? Et quelle est la situation du pays ? Car il ne faut pas se tromper de diagnostic. La situation économique de la France est catastrophique. Nos échanges extérieurs sont déficitaires depuis 2005. Le déficit de la balance courante a atteint près de 2 % du PIB de 2011 à 2013. La production industrielle est tombée en 2014 au niveau de 1994. Le déficit public est scotché au-dessus de 4 % du PIB chaque année de 2013 à 2015. La dette publique continue de dériver.

Mais il faut remonter plus loin. Le dernier point haut de l’économie française a été atteint en 1999. Au cours des quinze années suivantes, la part de la production industrielle dans le PIB a baissé de 30 %. Et la part des exportations françaises dans les exportations mondiales a chuté de plus de 40 %. Surtout, le taux de marge de nos entreprises était inférieur d’un tiers à celui des entreprises des pays qui sont nos principaux concurrents. Financièrement exsangues, trop spécialisées dans des productions de moyenne gamme, nos entreprises se trouvaient incapables de garder leurs parts de marché dans la zone euro et de profiter de la croissance mondiale hors zone euro.

La situation était donc déjà difficile en 2012 lorsque François Hollande a été élu. Mais il a déjà commis deux erreurs graves au moment où les Français lui confient le pouvoir. Le nouveau président a prononcé une série de discours menaçants contre la finance et les « riches » alors qu’il fallait promouvoir une finance régulée et exemplaire. En outre, il a annoncé une série de mesures coûteuses, dont un retour à la retraite à 60 ans pour la moitié de ceux qui partent à la retraite, qui vont peser sur la dépense publique. De surcroît, Hollande a augmenté massivement la fiscalité sur le capital et les entrepreneurs alors que la troisième révolution industrielle est hyper-capitalistique et hyper-entrepreneuriale.

Puis un nouvel Hollande a décidé de mettre en place le CICE et le pacte de responsabilité. Au début de 2014, à l’inverse des discours de 2012, le président a déclaré que « seules les entreprises créent la richesse » et, en substance, que « la dépense publique n’est pas la solution mais le problème ». Mais la dépense publique tarde à être reprise en main. En outre, les 50 milliards de baisse annoncée sont en partie un mirage. Ils sont en effet gagés sur une désindexation partielle de la dépense sociale alors que l’inflation a disparu.

C’est de surcroît une erreur de maintenir le déficit au-dessus de 4 % du PIB en 2014, 2015 et vraisemblablement en 2016. D’abord, le gouvernement y perd toute crédibilité. Ensuite, nous sommes très vulnérables si les taux d’intérêt remontent. Il faut donc ramener le déficit à 4 % en 2015 et 3,5 % en 2016 en prenant des mesures connues : renouer avec le non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant à la retraite, accentuer les restructurations de services publics.

Faut-il aller au-delà et, dans les deux prochaines années, couper brutalement la dépense de 50 milliards d’euros de plus ? Non, car cela accentuerait le risque de déflation. En revanche, il faut, pour redevenir crédible maintenant, couper la dépense future ! Plusieurs réformes de structures s’imposent.

En premier lieu, nous devons imposer un gel de la dépense publique en volume pendant au moins trois ans en menant les réformes nécessaires des régimes de retraite. Il est nécessaire de reculer l’âge de départ à la retraite à 64 ans et d’allonger la durée de cotisation à 44 ans d’ici à 2024. De même, afin de réduire les dépenses des collectivités locales, instituons l’élection des maires des intercommunalités au suffrage universel direct.

En deuxième lieu, il faut réintroduire la dégressivité des allocations chômage après 6 mois et réduire la durée d’indemnisation à 18 mois. D’autres dispositifs prendront en charge ceux qui n’auraient pas retrouvé de travail. En troisième lieu, il est indispensable de rétablir une structure de la fiscalité du capital dans la moyenne européenne si l’on veut relancer les investissements productifs.

Hollande a aggravé une situation déjà très sérieuse avant lui, puis a commencé à s’attaquer à la source du problème. S’il veut transformer son changement de cap en emplois, le président doit maintenant corriger sa réforme initiale de la fiscalité du capital. Bref, qu’il fixe une direction claire et qu’il s’y tienne !

CHRISTIAN SAINT-ÉTIENNE

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